Chapitre 1
De retour
« [J]’ai commencé à me demander sérieusement si je ne parviendrais jamais à m’adapter à une vie normale. On m’avait dépouillé de ma jeunesse, de ma famille, de mes amis, de ma ville et de sa communauté juive. J’avais survécu à des conditions inhumaines. Je savais qu’il me faudrait beaucoup de temps avant de pouvoir surmonter la douleur de tous les sévices que j’avais subis au cours de mes jeunes années. »
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Agnes Tomasov (1er rang, 3e en partant de la droite) et son amie Magda (1er rang, tout à droite) avec leur classe de dernière année d’études secondaires. Bardejov (Slovaquie), 1948. Agnes et Magda étaient les deux seules filles juives de la classe. Fondation Azrieli, avec l’aimable autorisation d’Agnes Tomasov.
Apprivoiser la liberté retrouvée
« Après avoir passé des années dans des baraquements et derrière des barbelés, nous retrouver dans une vraie maison dépassait l’entendement. Je pouvais sortir et rentrer quand je voulais. Je pouvais faire comme bon me semblait. De la fenêtre du quatrième étage, contemplant l’horizon qui s’ouvrait au-delà des toits de tuiles rouges, j’avais l’impression que des possibilités illimitées s’offraient à moi. Je savais comment m’organiser dans un univers anormal, mais que faire sans diplôme ni formation dans un monde où régnaient la liberté et le respect de la légalité, où tout était possible ? Je menais une vie sans but. Il est vite devenu évident qu’il fallait que je poursuive mon instruction avant tout […] En 1939, un brillant avenir m’attendait. J’avais hâte de terminer mes études et de me lancer dans un métier, avec toute la vie devant moi. En regardant ce terrain vague, j’avais l’impression qu’il ne restait plus rien de tout cela. Je n’avais reçu aucune formation, je n’avais nulle part où aller. Il ne me restait désormais qu’à prier Dieu pour que ma mère et ma sœur soient encore en vie. »
Une vie à soi
01:11
Kitty Salsberg (avec sa sœur Ellen) savait qu’elle ne pourrait jamais réaliser ses rêves sans quitter la Hongrie.
Rêver d’études
« À 25 ans déjà, je savais que, si je ne retournais pas bientôt sur les bancs d’école, je n’y retournerais jamais. Je n’avais jamais vu l’extérieur d’une université, encore moins l’intérieur. J’avais toujours rêvé de faire des études, de devenir un jour quelqu’un. Et voilà qu’après 25 ans d’existence, mon plus grand accomplissement était d’avoir survécu à la guerre. »
Chapitre 2