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Les Mots enfouis : Le Journal de Molly Applebaum

Cher journal

Dimanche 14 mars

J’ai rouvert mon carnet après une assez longue pause. Car aujourd’hui, nous passons la journée debout dans l’écurie, afin de nous étirer un peu. Et comme ce n’est vraiment pas confortable pour moi d’écrire allongée, j’ai emmené mon carnet là-haut. Mais les conditions ici ne sont pas bonnes non plus. Bien que nous soyons à la mi-mars, que le temps soit magnifique, que le soleil brille et que la terre dégage un doux parfum, je suis glacée jusqu’à la moelle. J’aimerais pouvoir franchir le pas de la porte de l’étable et m’asseoir sur le perron... C’est tellement loin et tout simplement hors d’atteinte que malheureusement, je ne devrais même pas m’aiguiser l’appétit et y songer. J’ai déjà du mal à imaginer une autre vie que celle que je mène actuellement. Sera-ce toujours comme cela ? Les souffrances s’arrêteront-elles un jour ?

Mercredi 7 avril

Le monde est si vaste, si incroyablement grand, qu’on ne peut en faire rapidement le tour ou en réaliser l’immensité, même par la pensée. Presque toute la surface du globe est habitée. Il paraît même que des gens vivent sur la face cachée de la lune et aussi sur Mars. Sur Terre, il y a de la place pour tous les êtres vivants. Hélas, il n’y a pas de place sur Terre pour deux pauvres créatures abandonnées. Ces deux pauvres et malheureuses créatures sont obligées de vivre sous terre, serrées dans une petite caisse dans laquelle on peut à peine s’allonger et où on se sent à l’étroit. S’asseoir est la seule chose dont on puisse rêver. Ces personnes sont allongées dans cette caisse depuis de longs mois et n’en sortent que trois heures par jour pour aller à l’étable. L’enfermement — la saleté, la vermine, l’obscurité et le manque d’air —, tout est comme dans un cercueil. Mais ces créatures sont heureuses que la situation soit ainsi et pas pire, et expriment leur reconnaissance pour ce « cercueil » dans leurs prières quotidiennes. Elles ne disent rien, elles ont cessé de se plaindre car elles savent qu’il n’y a pas de place pour elles sur Terre. Sommes-nous destinées à refaire surface un jour ?

Les Mots enfouis : Le Journal de Molly Applebaum, Molly Applebaum

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À l’automne 1942, les rafles de Juifs à Dąbrowa Tarnowska, en Pologne, obligent la jeune Molly Applebaum, 12 ans, et sa cousine Helen à trouver refuge dans une ferme où elles se cachent dans une caisse ensevelie sous terre. Enfermée dans ce « cercueil » de 1943 à 1945, Molly n’a pour seule compagnie que sa cousine et son journal. Au fil des jours, Molly décrit l’espace froid et obscur, la crasse et la vermine, la faim et la relation compliquée avec les deux fermiers polonais qui risquent leur vie pour sauver la sienne. Elle nous livre sans détours ses craintes, ses secrets et surtout son désir ardent de survivre. Les Mots enfouis présente l’extraordinaire journal de Molly, suivi des mémoires qu’elle a rédigés dans les années 1990. Ces deux textes, écrits à 50 ans d’écart, constituent un témoignage courageux et passionnant de son parcours pendant et après la guerre.

Préface de Jan Grabowski

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En bref
Pologne
Clandestinité
Journal intime rédigé durant l’Holocauste, accompagné des mémoires d'après-guerre
Camps de personnes déplacées (Autriche et Allemagne d’après-guerre)
Projet des orphelins de guerre
Immigration au Canada en 1948
Adaptation à la vie canadienne
Tranche d'âge recommandée
16+
Langue
Français

184 pages

À propos de l'autrice

Photo of Molly Applebaum

Molly Applebaum est née en 1930 à Cracovie (Pologne). Après la guerre, elle a passé trois ans dans des camps de personnes déplacées avant d’immigrer au Canada en tant qu’orpheline de guerre. Les Mots enfouis est la première traduction française du journal que Molly a rédigé en polonais de mars 1942 à janvier 1945, publié avec ses mémoires écrits dans les années 1990. Molly Applebaum vit à Toronto.