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La Fin du printemps

Le Départ

En avril 1942, la ville a perdu près d’un millier d’habitants. On nous avait informés que nous devions nous présenter avec nos bagages à un vaste entrepôt situé près de la gare. Les Juifs de Budějovice avaient un sens civique aigu – nous ne faisions pas d’histoires. Nous avions l’habitude de faire ce que l’on nous disait de faire, nous nous sommes donc rendus à l’entrepôt, avons présenté nos documents, des numéros nous ont été attribués et nous nous sommes préparés pour la nuit. Des enfants pleuraient et quelques garçons plus âgés ont commencé à chahuter.

Le jour suivant, on nous a dit de monter à bord d’un train de passagers qui nous emmènerait à un lieu de rassemblement. Notre souci principal était de savoir si ce nouvel endroit se trouvait en Tchécoslovaquie. C’était comme si nous avions moins de souci à nous faire tant que nous restions dans notre propre pays. Lorsque le train s’est mis en branle, nous avons eu pour la première fois l’occasion d’apercevoir les cruels SS (Schutzstaffel, escouade de protection) – les troupes d’élite nazies qui surveillaient les camps de concentration. Ils portaient des uniformes parfaitement repassés et leurs visages avaient des expressions quasi animales. Une de ces bêtes – un officier de haut rang avec de nombreuses étoiles à son revers – a inspecté le train. Aboyant des ordres en allemand, il a donné des coups de poing et des coups de pied à plusieurs personnes qui se trouvaient sur son passage. Le train a filé vers le nord, en direction de Prague, puis vers l’ouest. À la fin de la journée, on nous a débarqués à Terezín, le lieu de rassemblement. Terezín était une ville ancienne et comptait de nombreuses casernes de soldats, des immeubles de briques massifs à trois étages et plusieurs grandes esplanades. Un fossé faisait tout le tour de la ville, ce qui rendait toute tentative d’évasion impossible.

Lors de cette première nuit passée à Terezín, nous avons dormi dans un vaste entrepôt, accolés les uns aux autres, avec juste assez d’espace pour nous déplacer sur la pointe des pieds. Le lendemain, toutes les familles ont été séparées. Les femmes ont été emmenées dans l’une des grandes casernes et les hommes dans une autre. Nous n’avons pas eu beaucoup de temps pour nous dire au revoir car nous devions nous mettre en rang rapidement. La nourriture était distribuée à partir de grands tonneaux dans de petits pots qui étaient attribués à chacun des détenus de Terezín. Notre principal repas quotidien se composait de pain, de pommes de terre et de jus de viande.

Nous sommes restés à Terezín d’avril 1942 à novembre 1943. La ville était de plus en plus surpeuplée avec les convois de Juifs arrivant d’autres parties de la Tchécoslovaquie. Les personnes âgées et les personnes malades ont commencé à mourir rapidement. Chaque matin, nous voyions des corps recouverts de draps blancs être empilés dans des wagons, en attendant d’être transportés au crématorium.

Au début, nous habitions tous dans les casernes, à beaucoup dans une pièce, dormant par terre. Pourtant, en dépit de tout, les enfants trouvaient le moyen de s’amuser un peu. Nous étions autorisés à aller jouer dans la cour, à chanter et à jouer aux devinettes. Je me rappelle un enseignant chantant une chanson qui était sa préférée et ma préférée aussi : « Le printemps reviendra, le mois de mai n’est pas loin. »

La Fin du printemps, John Freund

Enfant, John Freund aimait écrire et jouer au football. La Fin du printemps raconte comment son enfance joyeuse a basculé après l’invasion de son pays d’origine, la Tchécoslovaquie, par les nazis en 1939. Espérant au début que le conflit et les persécutions prendraient rapidement fin, la famille de John Freund a enduré l’érosion systématique de ses droits avant d’être déportée d’abord à Theresienstadt, puis au camp de la mort d’Auschwitz-Birkenau. Le récit des souffrances de John Freund et la perte de son innocence sont d’autant plus poignants que ses mémoires témoignent d’une foi inébranlable en la nature humaine, d’un optimisme constant et d’une détermination courageuse à refaire sa vie au Canada.

Préface par Esther Goldberg

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En bref
Tchécoslovaquie
Ghetto / Camp de concentration de Theresienstadt
Camp de la mort d’Auschwitz-Birkenau
Tchécoslovaquie d’après-guerre
Marche de la mort
Projet des orphelins de guerre
Immigration au Canada en 1948
Ressources éducatives disponibles: Survivre à Auschwitz
Tranche d'âge recommandée
14+
Langue
Français

144 pages

Médaille d’or décernée lors des Independent Publisher Book Awards en 2008

À propos de l'auteur

Photo of John Freund

John Freund est né en 1930 à České Budějovice (Tchécoslovaquie, aujourd'hui en République tchèque). Durant l'occupation nazie, il a contribué à la rédaction d'un magazine clandestin appelé Klepy (Potins). Des exemplaires originaux du magazine sont aujourd’hui conservés au Musée juif de Prague. En 1948, John a pu immigrer au Canada du fait de son statut d’orphelin de guerre. Il réside à Toronto avec sa femme Nora, une ville dont il apprécie la scène culturelle, les galeries d’art et les musées.

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